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L’Europe observe avec inquiétude la manière dont les États-Unis multiplient les stablecoins adossés au dollar sur le marché des cryptomonnaies. Le pays semble fermement décidé à imposer le dollar sur les marchés numériques, consolidant ainsi sa domination financière.
Grâce à l’adoption du GENIUS Act, une vaste loi encadrant les actifs numériques, les États-Unis ont désormais une longueur d’avance considérable sur l’Union européenne dans le domaine des stablecoins, selon Pierre Gramegna, directeur du Mécanisme européen de stabilité (MES), qui appelle à une réaction rapide du Vieux Continent.
États-Unis contre Union européenne
Avec la loi GENIUS, Washington a ouvert la voie à de nombreux émetteurs capables de lancer rapidement et légalement des stablecoins sur le marché. Résultat : la capitalisation totale des stablecoins a explosé pour atteindre 267 milliards d’euros, et de nouveaux projets voient le jour à un rythme soutenu.
Pierre Gramegna estime que l’Union européenne doit accélérer le développement de stablecoins libellés en euro, afin de rivaliser avec les actifs américains.
Le dollar règne sur la crypto
Le premier stablecoin adossé à l’euro, EURC, ne pèse que 224 millions d’euros de capitalisation, contre des dizaines de milliards pour ses concurrents adossés au dollar. Un stablecoin est censé maintenir une parité fixe avec l’actif de référence ; l’EURC doit donc valoir environ 1 euro.
Lors d’une audition le 9 octobre 2025, Gramegna a averti que l’Europe ne devait pas dépendre des stablecoins en dollar, qui dominent largement le marché :
« L’Europe doit saisir le potentiel d’innovation financière des stablecoins et des actifs tokenisés. Dans un environnement financier en pleine mutation, elle devrait faciliter la création de stablecoins adossés à l’euro, même s’ils sont émis par des acteurs étrangers. »
Une prise de position marquante, alors que l’Union européenne considérait encore récemment les stablecoins comme un risque systémique.
Vers une monnaie numérique européenne
Paschal Donohoe, président de l’Eurogroupe, partage cette vision et juge qu’un euro numérique (CBDC) pourrait stimuler les échanges au sein de la zone euro.
Une CBDC fonctionne de manière similaire à un stablecoin, mais elle est émise et gérée par une banque centrale.
Selon Pierre Cipollone, membre du directoire de la BCE, l’euro numérique ne devrait pas voir le jour avant 2029, les législateurs européens ralentissant le processus. Il se dit favorable à la création d’une CBDC publique et opposé aux stablecoins privés.
Enfin, Christine Lagarde, présidente de la BCE, a averti que l’Union européenne devait combler les lacunes réglementaires afin d’éviter que des émetteurs étrangers de stablecoins libellés en euro ne siphonnent la liquidité de la zone euro.