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Les récents développements politiques au Japon peuvent sembler à première vue relever d’un dossier local, mais leurs répercussions sur les marchés financiers mondiaux sont considérables, et elles pourraient même influencer directement le cours du Bitcoin. En théorie, un changement majeur dans la politique monétaire japonaise pourrait aller jusqu’à mettre un terme au cycle haussier du Bitcoin. Il est donc temps d’examiner la situation de plus près.
Retour en arrière : le poids de la déflation japonaise
Depuis les années 1990, le Japon lutte contre la déflation.
Le vieillissement rapide de la population et la faiblesse de la consommation ont découragé les entreprises d’investir, ce qui a freiné durablement la croissance.
Pour contrer cette tendance, la Banque du Japon (BoJ) a adopté pendant des décennies une politique de taux d’intérêt extrêmement bas, voire négatifs.
Résultat : emprunter en yen était quasiment gratuit.
Les investisseurs du monde entier s’en sont servis pour financer une stratégie connue sous le nom de “Yen Carry Trade” : emprunter des yens à faible coût, puis réinvestir ces fonds dans des actions américaines, des obligations étrangères ou d’autres actifs à rendement plus élevé.
Le tournant de l’ère Takaichi
L’élection de la Première ministre Sanae Takaichi marque un changement de cap significatif.
Les rendements des obligations d’État japonaises à long terme se sont nettement redressés, la maturité à 30 ans atteignant même un plus haut historique.
JUST IN 🚨: Japan’s 30-Year Bond Yield jumps to 3.32%, the highest level in history 🤯 pic.twitter.com/M156Wz6kdb
— Barchart (@Barchart) October 7, 2025
Cette évolution s’explique par plusieurs facteurs :
- Takaichi prévoit d’importantes dépenses publiques pour soutenir la croissance.
- La BoJ semble prête à s’éloigner de sa politique de taux ultra-bas.
- En réduisant ses achats massifs d’obligations, la banque centrale laisse les marchés exiger des rendements plus élevés pour compenser le risque d’inflation et de dépréciation monétaire.
Cette remontée des taux pourrait fragiliser le Yen Carry Trade : si les rendements augmentent trop, les investisseurs japonais pourraient rapatrier leurs capitaux pour rembourser leurs emprunts en yen, provoquant une vague de ventes d’actifs à l’étranger.
Le véritable danger réside toutefois dans les taux courts.
Si la BoJ devait relever aussi ses taux directeurs, les investisseurs japonais seraient contraints de liquider une partie de leurs positions en actions américaines ou en actifs étrangers pour couvrir leurs dettes domestiques — un scénario qui enverrait une onde de choc sur les marchés mondiaux.
Pour l’instant, un risque maîtrisé
Ce scénario reste néanmoins peu probable à court terme.
Après la victoire de Takaichi, plusieurs signaux ont indiqué que le gouvernement souhaite freiner toute normalisation monétaire trop rapide.
Les marchés à terme vont dans le même sens : la probabilité d’une hausse des taux le 30 octobre n’est plus estimée qu’à 19 %, contre 57 % avant les élections.
Une aubaine pour Bitcoin et les marchés actions
Tant que Takaichi continue de considérer qu’une devise faible n’est pas un problème pour l’économie japonaise, le mécanisme du Yen Carry Trade restera intact.
Et tant qu’il fonctionne, il garantit une abondance de liquidités à l’échelle mondiale.
Pour les actifs risqués, des valeurs technologiques américaines jusqu’au Bitcoin, c’est une excellente nouvelle : le Japon maintient la pompe à liquidités ouverte, et tant que l’argent continue d’affluer, les marchés ont toutes les chances d’en profiter.